Berlin est réputée pour être une capitale artistique. Ici l’art n’est pas réservé aux collectionneurs privés, il n’est pas enfermé dans des galeries chics. Au contraire, il s’expose dans les nombreux « project spaces » et même dans la rue. Depuis mon arrivée à Berlin en 2010, j’ai souvent vu des performances artistiques s’organiser sur les trottoirs. C’est l’un des principaux attraits de la cité, la certitude d’être surpris à (presque) chaque coin de rue, qu’il s’agisse de street art ou de réalisations temporaires qui engagent le flâneur. D’ailleurs, si vous vous intéressez au street art, suivez notre visite guidée dédiée à cette thématique !
Partons à l'aventure
Puzzle dans la ville
Samedi j’avais rendez-vous à Friedrichshain au Cassopeia, un lieu multiple dont je vous parlerai plus tard. Etant en avance je suis allée faire un tour vers la Boxhagener Platz qui accueille tous les dimanches l’un des plus adorables marchés aux puces de Berlin. Mais nous étions samedi et ce ne sont pas des vêtements de créateurs que j’ai trouvés mais un puzzle grandeur nature.
Des cubes peints sur les 6 faces étaient dispersés sur le trottoir. Les passants, se prenant au jeu, unissaient leurs efforts pour reconstituer un puzzle. J’ai trouvé cette initiative très originale et ludique. Par chance, les artistes à l’origine de ce projet sont français ce qui a facilité nos échanges sur le comment et le pourquoi de ce drôle de puzzle.
Ce samedi, c’était la première fois que l’expérience était tentée dans la rue. Deux faces du puzzle avaient déjà été reconstituées avec succès par les promeneurs de l’après-midi.
L’idée, elle vient du peintre de ce puzzle aux 6 faces. Il avait déjà conçu un tel jeu il y a 10 ans, mais c’était avec des cubes pas vraiment carrés. Quand l’association avec laquelle il travaille lui a demandé une nouvelle idée de création artistique il a sauté sur l’occasion pour réaliser un nouveau puzzle, mais cette fois-ci avec des cubes de pro aux dimensions parfaites.
Quand une face du puzzle est terminée…on en commence une autre. Deux personnages munis d’une cagoule se chargent de déranger et de mélanger les cubes. Ces capuchons, dont l’interprétation est libre – lutins ou Ku Klux Klan – sont les reliquats d’une série de cagoules créée par notre peintre quand il était à l’armée !
Le thème des faces du puzzle ? Les peintures de propagande communiste. Là aussi les influences sont lointaines et croisées.
Pour découvrir le travail de ce peintre, rendez-vous à la galerie Igel (Seumestrasse 24, Friedrichshain) où seront exposées ses créations du 5 au 20 août. Le vernissage à lieu demain à partir de 19 heures.
Quant au puzzle, appelé aussi « Propacube », vous pourrez certainement y participer si vous vous baladez dans le coin de Boxhagener Platz durant le mois d’août. Ensuite nos artistes, connus sous le nom de Batarterror, repartent en France. Et oui, ils ne sont pas encore berlinois ! Mais leur création est déjà totalement dans l’esprit de la ville : conviviale et artistique.
Accident à la galerie C/O Berlin
En 2011, le C/O Berlin faisait parler de lui en mettant en scène un accident devant ses portes. Enfin celle de son emplacement précédent, l’ancienne poste de la Oranienburgerstrasse.
Le C/O Berlin présente des expos photos toute l’année mettant à l’honneur des photographes de tout poil. A coté des stars de la photo (Peter Lindbergh, journalistes de guerre de l’agence Magnum, Robert Mapplethorpe…), on découvre aussi les travaux de photographes prometteurs.
Cette exposition présentait Fritz Eschen qui photographia Berlin sous les décombres à la sortie de la guerre.
Délivrance, partir de rien
En 2012, trois Australiens (Kat, Will et Penny) s’étaient installés au 9 de la Schönhauser Allee dans un espace de 5 x 6 mètre. Ils y étaient entrés sans rien, pas de vêtements, pas de nourriture, pas de mobilier, strictement rien ! Ils comptent sur les passants pour pourvoir à leur besoin pendant les 10 jours que durait leur performance appelée Délivrance.
Déjà expérimentée à Melbourne cette expérience leur permettait d’observer des différences culturelles. Ainsi les bouteilles vides qu’ils avaient disposé à l’entrée de leur « maison » avaient été ramassées ce matin alors qu’en Australie leur espace avait rapidement été encombré par les détritus.
Toutefois ces trois artistes faisaient attention à leur petit territoire. Ils avaient construit une sorte de poubelle pour le compost et prévoyaient d’aménager le petit bout de verdure en jardin. 24 heures après leur arrivée ils avaient déjà le nécessaire pour survivre : des vêtements, une tente, des brosses à dents et… des pistolets à eau. Et quand nous avions été leur rendre visite un couple leur apportait des grands coussins.
Penny me confia que le plus difficile était d’apprendre à vivre au quotidien avec ses deux complices. Mais après leur première expérience à Melbourne ils se connaissaient bien. Rester dans leur 5×6 mètre était aussi un peu pesant mais ils ne s’ennuyaient pas car ils avaient régulièrement de la visite et parfois même en plein milieu de la nuit !
Un robot à Mauerpark
Non il n’y a pas que le karaoké et le marché aux puces le dimanche à Mauerpark ! Un robot est parfois là pour mettre l’ambiance.
L’inventeur de ce robot facétieux s’appelle Kolja Kvgler. Ce berlinois d’origine fit partie dans les années 90 du Mutoid Waste Company, un groupe d’artistes dont l’objectif est de transformer et redonner une autre vie aux déchets. Ils se firent connaître grâce aux sculptures géantes et extravagantes qu’ils créaient à partir de matériaux récupérés et de carcasses de voitures.
Kolja Kvgler voyage et expose ses créations à travers le monde. Si vous passez à Mauerpark un dimanche, jetez un œil à coté du bar Schönes Wetter, vous y ferez peut être sa rencontre et pourrez admirer les rouages incroyables de son robot !
Le Prater Theater créé le buzz
Le discret Prater Theater, annexe de la Volksbühne, fait son show sur la Kastanienallee.
Une mystérieuse construction noire cache des performances tous les week-ends au Prater Theater. Il faut prendre son courage à deux main pour entrer dans le sombre cube et découvrir ce qui s’y produit. A la manière d’un train fantôme on regarde à travers des fenêtres un monde étrange : films plutôt violents, voix inhumaines, acteurs masqués défilant à la manière d’automates, musiques terrorisantes…
Impossible d’avoir des explications, chacun y verra ce qu’il voudra. Prochaine pièce de théâtre annoncée ? « Nazi Park ». Le Prater Theater est décidément un provocateur.
Découvrez également le street art à Berlin, les expositions dans les métros ou encore les collections d’art privées.